Slide listening (2017)
Instrumentation: concertino for piano and orchestra
Duration: about 9 minutes
Premiere: March 5th 2017 by the three finalists of Piano Campus international piano competition.
Orchestre Melodix, conducted by Fabrice Parmentier
National Theater of Cergy-Pontoise
Publisher : Éditions Musicales Artchipel
Commission: Pascal Escande for Piano Campus competition
Slide-listening est une pièce écrite pour piano et orchestre qui s’éloigne quelque peu de la forme classique du concertino dans le rapport entre le soliste et l’orchestre. Ici le discours ne s’établit pas au sein d’un axe confrontation/dialogue, mais plutôt dans une volonté d’orchestrer l’instrument soliste, de créer une sorte de piano augmenté par l’orchestre. Ce dispositif compositionnel filtré laisse s’échapper quelques résidus orchestrés et autres textures autonomes pensées comme des respirations d’ordre environnemental, proches du design sonore.
La forme et le matériau convergent dans la figure du glissement. Du glissement de l’archet sur les cordes au glissement de clusters diatoniques au piano, du glissement des flutes à coulisses au glissement de la superball sur le tam, du glissement d’objets musicaux au glissement des situations d’écoute, ces diapositives sonores s’entrechoquent à un tempo soutenu.
Cette pièce, créée par les finalistes du concours international Piano Campus 2017, met par ailleurs en jeu ce que j’appelle des OEM (objets esthétiquement modifiés) issus du concerto pour piano de Schumann (au programme de la finale). Les OEM sont des fragments musicaux issus de la littérature classique ou traditionnelle ; ces fragments sont, un peu à l’instar des manipulations génétiques, d’abord prélevés, décontextualisés, modifiés esthétiquement, puis confrontés à un nouvel environnement musical.
La lune s'éteindra-t-elle ? (2023)
soprano and quartet
18 minutes
Premiered in 2024, March 7th at Musée Guimet by Michiko Takahashi, Ensemble Cairn.
Instrumentation: soprano, shô, clarinet (bass clarinet), microtonal accordion, cello and small electronic device.
Text: Dominique Quélen
Publisher: Éditions Musicales Artchipel
Commission: Fondation Franco-Japonaise Sasakawa
Le titre La lune s’éteindra-t-elle ? est une référence à un waka tiré du quatrième chapitre du Genji monogatari, ici traduit par René Sieffert :
De la crête des monts
ignorant le sentiment
la lune qui va
tout là-haut dans le ciel
peut-être s’éteindra-t-elle
Ce chapitre, intitulé Yugao, est l’un des rare à introduire du surnaturel : lorsque le Genji rendit visite à sa nourrice, il remarqua qu'une « belle-du- soir » était en fleur près d’une clôture en traversant un quartier populaire. Il envoya un homme la chercher, et l’habitante des lieux, Yugao, lui répondit en composant un poème en waka. Le Genji commença à s’éprendre de cette femme et, dissimulant son statut social, alla souvent lui rendre visite. Alors qu’un jour, il emmena Yugao et sa suivante Ukon dans une résidence éloignée et secrète, il vit soudainement en pleine nuit l'esprit d'une femme terrasser sa bien-aimée. Yugao perdit connaissance et mourut à l'aube. J’ai demandé à l’écrivain et ami Dominique Quélen d’écrire un texte qui relaterait les évènements de trois points de vue différents. De celui de Yugao, de sa suivante Ukon et enfin du spectre, dont on ne sait s’il s’agît de celui de Dame Rokujo. Musicalement, l’œuvre tente également de restituer trois points de vue d’un même matériau, à la manière d’une variation asymétrique. Entre les sonorités microtonales et les harmonies spectrales de l’accordéon et du shô se dissimulent électroniquement des sons de suikinkutsu (水琴窟) - dispositif que l’on trouve généralement dans les temples au Japon, qui consiste en une amplification de gouttes d’eau qui tombent dans un espace souterrain -. Car il est bien question ici de choc des espaces, d’une brèche qui s’ouvre entre les mondes, du surgissement soudain d’un antre inquiétant et mystérieux dont l’expression la plus saillante s’incarne dans l’écriture tripartite de la soprano.
The title La lune s'éteindra-t-elle? is a reference to a waka from the fourth chapter of the Genji monogatari, translated here by René Sieffert:
De la crête des monts / From the crest of the mountains
ignorant le sentiment / unaware of feeling
la lune qui va / the moon that goes
tout là-haut dans le ciel / high in the sky
peut-être s’éteindra-t-elle / perhaps it will be extinguished
This chapter, entitled Yugao, is one of the few to introduce the supernatural: when the Genji was visiting his nurse, he noticed that an "evening belle" was blooming near a fence as he passed through a working-class district. He sent a man to fetch her, and the local resident, Yugao, responded by composing a poem in waka. The Genji began to fall in love with this woman and, concealing his social status, often went to visit her. One day, when he took Yugao and his female companion Ukon to a remote, secret residence, he suddenly saw the spirit of a woman strike down his beloved in the middle of the night. Yugao lost consciousness and died at dawn. I asked writer and friend Dominique Quélen to write a text that would recount the events from three different points of view. From Yugao's point of view, the point of view of Ukon, his next wife, and finally the point of view of the spectre, which we don't know is that of Dame Rokujo. Musically, the work also attempts to recreate three points of view of the same material, in the manner of an asymmetrical variation. Between the microtonal sonorities and spectral harmonies of the accordion and the shô are electronically concealed sounds of suikinkutsu (水琴窟) - a device generally found in temples in Japan, consisting of the amplification of drops of water falling into an underground space -. For this is indeed a clash of spaces, a breach that opens between worlds, the sudden emergence of a disquieting and mysterious lair whose most salient expression is embodied in the soprano's tripartite writing.