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Black Village (2019)

musical theater

60 minutes

Premiere at Nouveau théâtre de Montreuil, December, 17th by Hélène Alexandridis and l'ensemble L'Instant donné.

Stage direction : Frédéric Sonntag​.

Tour at CDN Lorient, GMEM festival "Les Musiques" in Marseille.


Commission : Ensemble L'instant donné / fondation Salabert

Text by Lutz BassmannInstrumentation : 1 reciter, flutes, piano, percussions, violin, viola and cello

Dedication : Antoine Volodine.

Publisher : Éditions Musicales Artchipel


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Certaines rencontres nous bouleversent et nous accompagnent dans nos propres projections intellectuelles ou utopies artistiques. Elles participent à la construction de nos imaginaires. L’œuvre d’Antoine Volodine fait partie de ces découvertes marquantes et a, depuis plusieurs années maintenant, une influence devenue essentielle sur mon écriture musicale. 

Plusieurs de mes compositions sont plus ou moins directement inspirées par son univers. Ainsi, mon cycle Nara, qui met en regard mes impressions lors de la découverte de l’ancienne capitale du Japon avec la forme littéraire inventée de Narrats, que Volodine décrit comme « instantanés romanesques qui fixent une situation, des émotions, un conflit vibrant entre mémoire et réalité, entre imaginaire et souvenir ». Il en va de même avec la structure formelle de mon premier quatuor à cordes Neige de Jakuchu (éditions musicales Artchipel) qui redistribue dans le temps quelques autres formes littéraires décrites dans Le post-exotisme en dix leçons, leçon onze.

L’écriture de Volodine m’a permis de développer une réflexion sur l’élaboration d'une narrativité plurielle dans ma musique, constituée de blocs de sons aux perceptions temporelles différentes. L'étape suivante de ce travail référencé était naturellement de mettre ma musique directement en tension avec la matière textuelle volodinienne. C’est l’objet de cette adaptation du roman Black Village - signé de l’hétéronyme Lutz Bassmann.

J’ai choisi cet ouvrage pour la forme qu’il met en jeu, où les différents chapitres du livre sont toujours interrompus, comme empêchés : les narrats deviennent des interruptats. Ils s’inscrivent dans cet univers singulier des temps qui se rejoignent, qui se déforment, qui s’étalent à l’infini ou qui se rétractent dans l’instant. Des brèches s’ouvrent, des espaces se créent, écarts propices à la composition d’un entre musical. 

En ce sens, le temps musical devient à la fois le réceptacle et l’écho de la matière littéraire ; quelques références au passé, modifiées esthétiquement et temporellement, participent à cette construction uchronique. Cette dislocation et ces agrégats de matériaux, pensés en interruptats musicaux, s’incarnent principalement dans une orchestration mettant en valeur des modes de jeux particuliers et une exploration du rapport entre le timbre et la perception temporelle.

Au-delà du rapport d’interruption et d’empêchement, la musique tente, pour reprendre le concept de François Jullien de dé-coïncider avec le texte en évitant tout rapport illustratif, même si l’occasion d’utiliser les images littéraires donnent lieu à une réflexion sur l’anecdote comme point de contact entre texte et son - la naissance d’une flamme par exemple, devenant objet musical structurant.   Certains épisodes musicaux traduisent quant à eux, par distanciation, l’humour du désespoir se diluant dans les trames narratives.

De fait, cette musique ne peut exister sans le texte ; elle en propose une interprétation, une appropriation qui accompagne sa « progression vers le rien », vers le silence.


Some encounters move us and accompany us in our own intellectual projections or artistic utopias. They help to shape our imaginations. Antoine Volodine's work is one of these striking discoveries, and for several years now it has had an essential influence on my musical writing. Several of my compositions are more or less directly inspired by his universe. My Nara cycle, for example, contrasts my impressions of Japan's ancient capital with the invented literary form of Narrats, which Volodine describes as "novelistic snapshots that fix a situation, emotions, a vibrant conflict between memory and reality, imagination and recollection". The same applies to the formal structure of my first string quartet, Neige de Jakuchu (published by Artchipel), which redistributes in time some of the other literary forms described in Le post-exotisme en dix leçons, leçon onze. Volodine's writing enabled me to develop a reflection on the elaboration of a plural narrative in my music, made up of blocks of sounds with different temporal perceptions. The natural next step in this referential work was to put my music in direct tension with Volodin's textual material. This is the purpose of this adaptation of the novel Black Village - by the heteronymous Lutz Bassmann. I chose this work for the form it takes, in which the different chapters of the book are always interrupted, as if prevented: the narrators become interruptats. They become part of this singular universe of times that come together, become distorted, spread out infinitely or retract into the moment. Breaches open up, spaces are created, gaps conducive to the composition of a musical interval. In this sense, musical time becomes both the receptacle and the echo of the literary material; a few references to the past, modified aesthetically and temporally, contribute to this uchronistic construction. This dislocation and aggregation of materials, conceived as musical interruptions, is embodied principally in an orchestration that highlights particular modes of playing and an exploration of the relationship between timbre and temporal perception. Beyond the relationship of interruption and impediment, the music attempts, to use François Jullien's concept, to de-coincide with the text by avoiding any illustrative relationship, even if the opportunity to use literary images gives rise to a reflection on the anecdote as a point of contact between text and sound - the birth of a flame, for example, becoming a structuring musical object. Certain musical episodes, for their part, translate the humour of despair diluted in the narrative by distancing themselves from it.

In fact, this music cannot exist without the text; it offers an interpretation of it, an appropriation that accompanies its "progression towards nothingness", towards silence.




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